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Portraits

17 février | 0h00

Hannibal Mejbri, le guerrier français à la conquête de Manchester

Hannibal Mejbri est l'un des très grands espoirs du football de demain. Découvrez-le plus en détails avec notre rubrique Certifié espoir.

10 min.
MEJBRI

Grand espoir du football, le milieu de terrain de 18 ans a quitté la France depuis deux saisons pour s'engager dans l'un des clubs les plus prestigieux d'Angleterre. Aujourd'hui avec la réserve (U23), il pourrait très prochainement faire ses débuts en Premier League. Portrait de ce numéro 8 à suivre de très près.

Avec sa chevelure frisée, difficile de ne pas reconnaitre Hannibal Mejbri. Benjamin d’une fratrie de quatre, le garçon a très vite découvert l’univers du ballon rond. Accompagné par son père, Lofti, le natif d’Ivry-sur-Seine (Val de Marne) se rend aux bords des terrains les weekends pour voir jouer son frère Abderrahmen, de 11 ans son aîné. « Je me rappelle que, quand il avait 2 ou 3 ans, il était venu avec moi jouer au foot au terrain de la banane. A l’époque il était en béton, il était tombé et s’était foulé un doigt et en rentrant il avait mal. Et je me suis fait engueuler par mon père. Il m’avait ensuite interdit de le sortir avec moi. Hannibal ne pleurait pas parce qu’il avait mal mais parce qu’il voulait absolument jouer au foot dehors. »Une anecdote qui symbolise déjà bien la passion du jeune garçon.

C’est au Paris FC qu’il fait ses débuts en 2009, à l’âge de six ans. Un club proche du domicile familial du 20e arrondissement de la capitale. Et dès ses premières années, le garçon impressionne par ses qualités athlétiques et mentales. Entraîneur de Hannibal, Reda Bekhti témoigne : « Ses qualités sont l’intelligence de jeu associée à une grosse qualité technique balle au pied, par la passe ou par un dribble, accompagné d’un gros volume. Il était en avance psychologiquement, il jouait et réfléchissait comme un adulte dès son plus jeune âge. »

Déjà leader dans l’âme, sur le terrain et en dehors, celui qu’on surnomme « Nino » a déjà cet esprit de compétiteur. « Dans le bon sens du terme ; il aime que les choses soient bien faites. C’est un vrai perfectionniste et pour certains c’était perçu comme de l’arrogance ce qui est tout le contraire », confie son ancien éducateur. Un discours appuyé par le frère : « Il n’est pas égocentrique comme certains le pensent. C’est un gagnant, il aime les challenges, il sait être un bon perdant mais il n’aime pas la défaite. Il est perfectionniste. »

Dans les pas de Kylian Mbappé !

Après huit saisons dans son premier club formateur, c’est le temps de l’envol pour Hannibal Mejbri. A l’été 2017, il rejoint donc l’AC Boulogne Billancourt et passe par l’Institut National du Football (INF), tout comme Kylian Mbappé, dont il termine le cursus en juin 2018. Lors de cette unique saison auprès de la formation boulonnaise, réputée pour son excellence et son rôle de tremplin, il remporte la Coupe de Paris U15 contre le PSG. Ensuite, il choisit délibérément de ne pas rejoindre le Paris Saint-Germain.

« Signer à Monaco, c’est mon choix car c’est un club qui donne sa chance aux jeunes. On y a plus de chances de percer qu’au PSG. L’étranger, si tout va bien, je pourrais y aller plus tard. Mais avant de penser à tout ça, je dois déjà m’imposer dans les équipes de ma catégorie. Kylian Mbappé ou Moussa Sylla sont forcément des modèles. Je rêve de suivre leur exemple mais je sais que je ne suis qu’au début et le chemin est encore long… », déclarait-il alors dans les colonnes du Parisien.

A Monaco, il va très vite confirmer tous les espoirs placés en lui. Intégré au groupe des U17 Nationaux, il s’affirme avec son numéro 8. « Il a frappé les esprits de la même manière que Mbappé l’avait fait quelques années avant lui », confie un suiveur de l’Academy. S’il n’occupe pas le même poste sur le terrain, bien qu’il ait un temps évolué également sur le côté de l’attaque, Hannibal Mejbri est l’un des très grands espoirs du football de demain, et peut-être même d’aujourd’hui. « Il était clairement au-dessus et avait une vision du jeu exceptionnelle. Quand ils faisaient l’engagement, ses partenaires lui donnaient le ballon. Il tirait tous les coups de pied arrêtés et avait un jeu long exceptionnel », s’extase-t-il.

Très fort sur les coups francs, il est également un joueur très altruiste, « parfois trop », et disponible sur le terrain. « Il brille en faisant briller les autres. Il a toujours usé de sa générosité pour faire briller ses coéquipiers, il a une vision de jeu sans égal et une combativité innée », assure Abderrahmen. Celui qui se décrit « assez proche » de son frère apprécie passer du temps avec lui. Malgré leur différence d’âge (11 ans), ils entretiennent de bons rapports, échangent ensemble régulièrement sur les prestations du benjamin de la famille. Comme dans toutes les fratries, il arrive aussi qu’ils se chambrent mais ce qu’ils apprécient particulièrement c’est de « jouer l’un contre l’autre, parler de tout et de rien ».

Déjà convoité par les grands clubs dès ses 8 ou 9 ans, « Nino » reste les pieds sur terre, bien aidé par sa famille. « Mes parents l’accompagnent tout le temps. Ils savent quel est l’enjeu de ce soutien. Etant petit cela l’a beaucoup aidé psychologiquement lors des tournois et des matchs, c’était déjà un soutien assez conséquent. Et je pense que c’est grâce à ça qu’il a appris à se protéger », témoigne son frère. Curieux, humble, il est également un garçon intelligent, doué à l’école et qui apprend vite. Malgré un an d’avance en Première scientifique, il n’a pas encore passé son baccalauréat en raison des soucis rencontrés lors de son année à Monaco. Aujourd’hui, il perfectionne son anglais grâce à des cours à distance. Une langue nécessaire pour évoluer au plus haut niveau outre-Manche.

Un couac à Monaco et un nouveau souffle à Manchester

Son aventure monégasque va (très) vite prendre fin. En mai 2019, l’entourage du joueur tente en effet de casser unilatéralement le contrat de la pépite franco-tunisienne considérant que celui-ci n’avait pas été homologué par la LFP et n’était pas légal selon le système français. « Un des plus grands conflits qu’ait connu le centre de formation l’AS Monaco », commentait alors Mohamed Bouhafsi, journaliste RMC Sport. Une procédure a même été ouverte auprès de la Ligue de Football Professionnel. Finalement, Hannibal Mejbri, qui avait arrêté sa saison fin avril, quittera le club de la Principauté fin juillet pour s’engager à Manchester United. Le club du Rocher aurait perçu dix millions d’euros pour ce transfert (dont 5M€ de bonus).

« Cet épisode reste une simple expérience, c’est une page qui s’est tournée aujourd’hui. Nous sommes concentrés sur le présent. La famille l’a mal vécu mais tout cela est derrière nous », assure l’entourage du joueur. Désormais concentré sur Manchester United, Hannibal Mejbri espère y briller et jouer en équipe première avec Paul Pogba. L’international tricolore fait partie de ses modèles, tout comme Xavi et Iniesta au Barça ou encore Zidane et Messi. Ancien directeur de l’AS Monaco Academy, devenu par la suite recruteur et à l’origine de sa venue chez les Rouge et Blanc, Nicolas Weber nous confiait il y a un an tout juste : « Mejbri, on va bientôt le voir découler à Manchester parce qu’il est très fort. » Ole Gunnar Solskjær a même indiqué il y a seulement quelques jours qu’il rejoindrait l’équipe première tout comme Shola Shoretire, ailier gauche de 17 ans anglo-nigérian.

Si beaucoup commencent à le connaître pour ses performances sportives, peu le connaissent sur le plan personnel. Le natif de région parisienne est par exemple un grand amateur des échecs. Jeu de société nécessitant beaucoup de concentration et un esprit de tactique, il a certainement contribué à ce qu’est devenu Hannibal sur le terrain. « Nos parents ont tout fait pour qu’on ne manque de rien. Notre mère a fait en sorte qu’on soit bon a l’école. Elle ne voulait pas qu’on reste au quartier pendant les vacances. On avait toujours des activités à faire (centre de loisirs, ski, stages de découverte) car mes parents connaissaient les risques des quartiers. Ils nous ont toujours donné les moyens de ne pas y rester par peur de succomber », livre Abderrahmen.

Hannibal Mejbri est donc très ouvert d’esprit et sociable. « Il s’est découvert une passion pour les animaux, révèle son frère. Après ça reste un adolescent comme un autre, il joue à la PlayStation, regarde des séries, des mangas, des films. » D’ailleurs, s’il a un défaut à reprocher à « Nino », ce serait bien l’usage du téléphone. Personne simple, l’international tricolore U16 et U17 (15 sélections) semble donc posséder les qualités humaines, athlétiques, techniques et mentales pour percer au plus haut niveau. Les prochaines semaines nous en diront plus…

Le mot de la fin

Abderrahmen Mejbri : « Je remercie Sami Guenfoud, Reda Bekhti, Ismael Bamba, Philippe Bretaud, Fabien Caballero. Tous ces éducateurs ont rendu meilleur Hannibal et lui ont permis de s’améliorer dans plusieurs domaines. L’exigence de Sami et de Reda a rendu Hannibal encore plus perfectionniste qu’il ne l’était avant. Hannibal était le joker de Ismael Bamba. Mr Bretaud a mis de l’ordre dans les qualités de mon frère. »

Portrait réalisé par Yanis Ben Messaoud et Geoffrey Leplang


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