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Interviews

23 décembre | 13h15

Julie Decaudain : « Il y en a encore des arbitres qui me demandent d’appeler mon coach pour remplir la feuille de match »

En R1, les U18 masculins de l’US Laon sont dirigés, depuis quelques mois, par une femme, en l’occurrence Julie Decaudain. Cette ancienne joueuse de haut niveau du Stade de Reims affiche à 35 ans un profil complet tant au niveau sportif que dans le domaine de la formation.

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Avant d’entrainer, quelles ont été vos différentes étapes footballistiques ?

J’ai débuté le football à l’âge de 5 ans en mixité dans mon village. Il s’agit de Pouilly-sur-Serre, à une quinzaine de kilomètres de Laon. C’était mon père qui gérait le club et nous entraînait. Je jouais avec les copains de la commune. Cela a duré jusqu'à mes 17 ans. C’est formateur d’évoluer avec des hommes car c’est une expérience utile notamment en matière d’intensité. J’ai ensuite pris la direction de l’US Laon qui venait de créer une section féminine avant de rejoindre, en D2, l’US Compiègne, 5 ans plus tard. Mes autres étapes : Arras toujours en D2 puis Saint-Quentin chez les « mouettes » en inter régions, avant de poser mes valises au Stade de Reims. J’y suis restée 8 ans dont presque la moitié en tant que joueuse. Je suis aussi une supportrice du club champenois. Nous sommes montées dès la première année de Division d’honneur en D2. Au moment de son accession en D1, j’étais toujours joueuse mais j’ai arrêté à 32 ans à cause d’une cheville délicate. Lors de ma deuxième saison à Reims, David Guion, alors directeur du centre de formation, avait commencé à me faire passer mes premiers diplômes. Là je suis restée 2 ans avec l’équipe masculine avant de diriger des sections féminines. J’ai également passé différents diplômes et occupé plusieurs postes, notamment pour la Région Grand-Est ou encore en tant que formatrice à la Ligue de Football des Hauts-de-France. Pour pouvoir passer le Brevet d’Entraîneur de Football, il me fallait trouver une équipe à 11 en Ligue afin de réaliser un stage pratique. Cela s’est fait à l’US Laon au moment où une nouvelle équipe de dirigeants est arrivée avec à sa tête, Christophe Baudat. J’ai eu les U17 R1, l’an passé. Conjointement, j’ai décroché mon BEF. À la fin de la saison, l’USL m’a proposé de poursuivre l’aventure avec les U18 notamment parce que la première expérience avait été écourtée à cause de l’arrêt des compétitions dû à la Covid-19. Je suis responsable de toute l’école de Foot masculine du club depuis cette année. Parallèlement, je continue toutes mes activités à la Ligue et au District Aisne. J’ai aussi été consultante pour France Bleu Reims.

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Julie Decaudain sous les couleurs du Stade de Reims.

En quoi entrainer une équipe masculine peut-il être différent que de diriger des filles ?

Déjà, j’ai eu de belles expériences humaines avec les U13 et U18 rémoises. J’aime les deux publics. Je n’ai pas de préférence. Il y a bien sur des différences. Diriger les espoirs laonnois évoluant en R1 juste avant les nationaux, c’était une belle opportunité dans ma progression. C’est plus simple de gérer des hommes. Chez les filles, des petits conflits peuvent durer des semaines voire des mois sans pour autant en connaitre les origines. Les garçons vont le dire tout de suite et les régler entre eux. Cela m’est déjà arrivé de mettre les points sur les I à quelques joueurs. La séance suivante, c’est comme s’il ne s’était rien passé. Mes joueurs sont gentils. Je n’ai eu aucun souci avec eux.

Actufoot • R1 U18 Julie Decaudain coach

Julie Decaudain à l'entrainement avec les U18 de l'US Laon

Photo : US Laon

Comment se sont passées vos toutes premières semaines d’entraîneure d’une équipe masculine ?

J’ai bénéficié du fait que j’étais connue. Des joueuses venant de Laon, qui ont joué au Stade de Reims et sont en plus diplômées, il n’y en a pas beaucoup ! Cela a été synonyme de crédibilité auprès de mon groupe. Les deux-trois premières séances d’entrainement, j’ai touché le ballon avec les garçons. Cela a aidé aussi. Je n’ai eu aucun souci ni avec les parents, ni avec le club ou encore avec les joueurs. Tout cela s’est fait naturellement.

En dehors du club, quelles sont les réactions qui peuvent vous agacer ?

En école de football, tout se passe bien. Je passe un peu pour la maman. En revanche, en U17 ou U18, cela ne parait pas normal pour beaucoup de monde. Pourtant, j’ai un CV en tant joueuse et éducatrice formée. Lorsque j’ai passé mon BEF, j’étais la seule fille de la promotion à côté de personnalités comme Ludovic Obraniak. Malgré tout, pour certains, cela choque encore notamment chez quelques arbitres. Il y en a encore qui me demandent d’appeler mon coach pour remplir la feuille de match.

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Julie Decaudain en formation (BEF)

Photo : Jean-François Niemezcki

Quel type de coach êtes-vous ?

Je suis rigoureuse parce que j’étais habituée à ce rythme-là en D1 et en D2. Nous devons observer une certaine discipline et une rigueur pour pouvoir prétendre enchainer les résultats au plus haut niveau. J’essaie d’inculquer ces valeurs. J’aime que ce soit carré mais je sais aussi m’amuser et être à l’écoute. J’aime la compétition. Je ne suis pas là pour du loisir. Je souhaite que mes jeunes intègrent l’équipe première séniore de Laon la saison prochaine. Je suis là pour les aider à franchir ce palier et donc à progresser. Je mets aussi en place des activités ludiques comme une spécifique de Noël où il y a des récompenses à la suite d’épreuves.

Quel est le bilan de votre équipe depuis le début de saison ?

Il n’est pas fameux. Nous avons connu un début de saison compliqué. L’année blanche y est sûrement pour beaucoup. La préparation a été marquée par des blessures. Cela reste des mineurs dont certains partent en vacances. Ce qui fait défaut aussi, c’est que géographiquement nous sommes un peu isolés. Au niveau ligue, il n’y a que Saint-Quentin et nous comme formations de l’Aisne. Pour trouver des joueurs de niveau régional et ainsi pouvoir étoffer notre effectif, c’est très compliqué. L’équipe est aujourd’hui douzième sur quatorze avec deux victoires au compteur. Nous avons disputé 10 rencontres. Entre les blessures et les suspensions, j’ai rarement pu disposer de mon équipe-type. Comme ce sont des U-18, certains sont retenus par les séniors. J’espère qu’au mois de janvier, je vais pouvoir récupérer plusieurs blessés.

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R1 U18 US Laon

Photo : US Laon

Quels sont vos projets ?

Au terme d’une période intense marquant ma formation en vue d’obtenir mon BEF, en juin dernier, ma priorité c’était déjà de souffler. Je veux me focaliser sur cette saison en R1 pour pouvoir mettre des séances type BEF. Ce que l’on connait en ce moment à cause de la pandémie fait que l’on ne peut pas dire que je suis gâtée. C’est très formateur. À terme, je pourrai peut-être d’ici trois à quatre ans passer au Centre National de Football à Clairefontaine (78), le Diplôme d’État Supérieur mention Football. Il faut pour cela pouvoir le financer et diriger une équipe en adéquation. Les U18 R1 ne suffira plus. Dans tous les cas, ma priorité c’est d’entrainer le plus longtemps possible car je suis avant tout une compétitrice. J’ai besoin de cette adrénaline du week-end.

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