21 janvier | 16h30
Léandre Chouya : « A 51%, je choisis un joueur pour ses qualités humaines »
Au moment où la période hivernale des transferts s’achève, nous vous proposons un échange avec Léandre Chouya. Depuis 20 ans, il est agent officiel de joueurs. Aujourd’hui, il en une vingtaine sous contrat. Ancien footballeur, Léandre Chouya, d’origine nordiste, vit en métropole lilloise. Photo : Eric Decoudun
Qu’est-ce qui est l’origine de votre vocation ?
Durant ma carrière de joueur, j’ai pu ressentir à un certain moment des manques. A mon époque, il y a plus d’une vingtaine d’années, il devait y avoir une trentaine d’agents dans l’Hexagone. J’ai eu aussi plein d’exemples de joueurs notamment étrangers que l’on abandonnait. Nous n’étions pas forcément satisfaits. J’avais envie de faire le métier d’une certaine façon s’appuyant sur la manière dont j’aurais aimé que l’on s’occupe de moi
Vous êtes agent officiel. Qu’est-ce que cela veut dire ?
Je précise pour commencer que beaucoup de gens aujourd’hui en France n’ont pas le droit d’exercer et malgré tout ils se disent agents. Personnellement, j’ai passé un examen que j’ai obtenu. Je suis agent FFF (Fédération Française de Football).

Ludovic Ajorque (à gauche). Joueur strasbourgeois dont Léandre Chouya est agent officiel.
C’est primordial que je connaisse bien le joueur. Je pense à son environnement, sa compagne, la famille, son éducation ou encore son caractère.
Quelles ont été les différentes étapes avant de pouvoir exercer votre métier ?
A la fin de ma carrière de joueur, j’ai mis un an et demi avant d’obtenir ma licence. J’ai pris notamment des cours de droit ou encore de commerce. J’ai travaillé sur tous les règlements FIFA, UEFA ou encore de la FFF .Tout simplement, je suis reparti à l’école. Il y a un vrai examen à passer sinon on n’a pas le droit d’exercer. Nous sommes contrôlés tous les ans. Nous avons des comptes à rendre. On doit tout enregistrer comme par exemple, les opérations réalisées, les contrats signés, les mandats.
Quel type d’agent êtes-vous ?
L’aspect humain est hyper important pour moi. Quand je choisis un joueur c’est d’abord pour ses compétences sportives car cela me parait être le plus important. A 51%, je choisis un joueur pour ses qualités humaines. Nous devons avoir confiance l’un envers l’autre. Pour cela, il faut bien se connaitre. De mon point de vue, c’est primordial que je connaisse bien le joueur. Je pense à son environnement, sa compagne, la famille, son éducation ou encore son caractère. Ces éléments-là sont importants parce que le jour où il va falloir choisir un club, ils peuvent être déterminants. Je suis très proche de mes joueurs. Je ne suis pas là uniquement que pour le football. Avant de signer un contrat, on doit apprendre à se connaitre. Cela peut éviter des problèmes. Cela concerne notamment les jeunes joueurs. J’essaie aussi de trouver des personnes qui sont passées dans les mailles du filet. Parfois, certaines d’entre elles rentrent en centre de formation et finalement ne sont pas prêtes mentalement. Le fait de repartir dans un club de N2 ou de N3 peut permettre à un footballeur de reprendre confiance en lui. Après avoir obtenu, une belle formation professionnelle, il se rend compte qu’il a déjà toutes les armes. Ces joueurs-là ont aussi une telle fraicheur que certains pros peuvent perdre dans un premier temps. Quand on revient, on se sent souvent plus forts. Je pense notamment à l’ancien arrageois, Thomas Delaine, aujourd’hui au FC Metz.

Issam Rézig . Joueur wasquehalien dont Léandre Chouya est agent officiel.
Photo : Eric Decoudun
Est-ce que c’est vous qui le plus souvent choisissez un joueur ?
Pas tout le temps. Il m’arrive d’en solliciter mais c’est plutôt rare. Souvent ces joueurs-là sont approchés par « mille personnes » qui ne sont pas forcément tous des agents. En général c’est plutôt de bouches à oreilles. C’est grâce à une remontée d’informations. J’arrive aussi à en obtenir auprès des clubs. C’est tout simplement, 20 ans de réseau pour ne pas dire 30 ans. J’ai aussi des gens qui travaillent pour moi. C’est souvent des amis de mes joueurs.
Comment jugez-vous l’évolution de votre métier ?
Déjà, je trouve qu'il y a aujourd'hui plus d’agents que de joueurs. C’est quand même problématique. j’ai l’impression qu’aujourd’hui, tout le monde fait ce métier. J’ai presque envie de dire que le « boucher du coin »le fait. Je précise que je n’ai rien contre cette profession. Cela me rend dingue car c’est un vrai job. Il faut avoir une bonne connaissance des contrats ou encore les codes du milieu. Il faut bien maitriser les différentes caractéristiques d’un joueur avant de le proposer à un club. Ce n’est pas non plus parce que l’on est un joueur pro que l’on peut devenir agent. Certains n’ont pas eu de carrière et pourtant ils sont très bons dans leur domaine.
L’actualité c’est le mercato d’hiver. Comment percevez-vous cette période ?
Cette période-là n’est pas celle où je réalise énormément de transactions. Je ne l’aime donc pas trop. Selon moi, transférer un joueur dans un groupe qui a déjà 6 mois de vie commune ce n’est pas évident. Le garçon arrive. Il va devoir peut-être prendre la place d’un joueur qui est adoré par le vestiaire. Il n’aura pas fait la même préparation que les footballeurs déjà présents. Il va falloir qu’il s’adapte. Ce n’est pas ma tasse de thé. Maintenant, il y a des offres que l’on ne peut pas refuser. Quand on a le sentiment que le train ne va peut-être pas repasser et que l’on nous présente une belle proposition, vous êtes obligés de dire : « ok, on fonce ! ». Cela peut aussi permettre à des jeunes joueurs appartenant à un club de Ligue 1 et qui manquent de temps de jeu de partir dans une formation de Ligue 2 ou de National. Je me sers le plus souvent de ce marché-là pour préparer l’exercice estival. C’est important pour un joueur d’être présent dès le début de la préparation. Il vit avec le groupe par le biais de stages. C’est de plus en plus rare car maintenant tout s’affole vers la fin de la période d’été.
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