19 janvier | 18h20
Mickaël Darnet : "L'amour du ballon, j'ai le sentiment qu'il n'existe plus"
Auteur de 4 buts et 3 passes décisives en 7 matches de N3, Mickaël Darnet (33 ans) n'est pas totalement satisfait de son rendement. A J-2 de la réception de Balagne, l'attaquant de l'ESCR s'est confié en toute transparence sur sa saison et sa vision du foot dont il a constaté l'évolution au cours de sa longue carrière. (Photos : Giani Delporte).
Après la large défaite dans le derby à Cannes, l'ESCR a bien réagi à Istres (0-2) samedi dernier...
L'équipe a fait un bon match dans sa globalité. On a juste eu un peu eu de mal à poser le ballon et développer notre jeu, mais quand on a besoin d'un résultat et qu'il y a un peu plus de pression, il faut aussi savoir gagner comme ça. Par contre on a fait une deuxième extrêmement solide, c'était la guerre pendant quarante-cinq minutes ! Quand tu n'es pas de base une "équipe de guerre" mais plutôt une équipe qui joue au ballon, savoir que tu peux gagner des matches sur un autre aspect du foot, c'est encourageant. A Cannes, on fait deux grosses erreurs qui coûtent deux buts d'entrée. Sinon, on restait sur une bonne série.
Avec un bilan parfaitement équilibré (quatre victoires et autant de nuls et de défaites), comment juges-tu cette première partie de saison qui s'achève samedi à domicile contre Balagne ?
Si tu gagnes contre Balagne, la première phase sera plutôt bonne. Si je dois comparer avec les autres années, on a toujours commencé fort nos saisons avant de connaître un coup de mou sur les quatre, cinq derniers matches avant la trêve. Cette année, c'était le contraire, je n'ai pas trop d'explications à ça. En s'imposant samedi, on sera à 19 points dans les six, sept premiers. Ca permettrait de voir la deuxième partie de saison un peu plus sereinement.
L'équipe regarde-t-elle plus vers le haut ou vers le bas ?
L'ES Cannet-Rocheville reste un petit club si l'on regarde le budget, les structures. On essaie toujours de vite se maintenir pour avoir l'esprit libéré sur la fin de saison. En tant que compétiteur, on ne regarde jamais vers le bas. Moi, dans ma tête, je joue la montée ! Si tu gagnes les 13 ou 14 matches qu'il reste à jouer, tu montes en National 2. C'est peut-être facile de parler et de calculer de cette façon mais les coéquipiers et moi, on joue tous les matches pour les remporter.
Je me dois de faire au moins un but ou une passe décisive à chaque sortie
Mickaël Darnet
A titre personnel, comment analyses-ta saison jusque-là ?
J'ai quatre buts et trois passes décisives. C'est moyen par rapport à mon niveau. Je pense que j'aurais pu être au moins au double de buts car il y a un ou deux matches lors desquels j'ai manqué d'efficacité. Si tu prends juste les statistiques, être sept fois décisif en 8 matches, ça parait bien mais ce n'est pas comme ça que je le vois. Je me dois de faire au moins un but ou une passe décisive à chaque sortie. Bien sûr, si l'équipe monte et que je ne marque pas de l'année, je signe tout de suite. J'ai 33 ans et aucun objectif dans le football. Je suis là pour aider mon équipe, le club du Cannet et quelques jeunes du groupe qui, je pense, peuvent jouer beaucoup plus haut.
A 33 ans et de par ton métier de coach sportif, on présume que tu portes une attention particulière à la récupération et au travail invisible pour continuer de performer ?
Mon corps, c'est ma vie. Physiquement, je me sens très, très bien. Je pense que mon niveau de jeu est supérieur aux années précédentes car avec l'âge, tu prends de l'expérience, tu gères et analyses mieux les matches et ton stress. Tu fais tout mieux, en fait. Comme je l'ai dit, je pourrais cependant être plus efficace pour mon équipe. Ce qui est le plus dur à mon âge, ce sont les terrains synthétiques. Quand tu as 33 ans et que tu te lèves tous les jours entre 5 et 6h pour travailler et que tu enchaînes avec les entraînements, ce n'est pas la même chose qu'à 20 ans. Tout ce qui concerne l'alimentation et le sommeil, je le gère plutôt très bien.
Moi le premier, j'ai déjà changé de club parce que financièrement ça m'arrangeait davantage
Les prouesses de Nassim Akrour qui va jouer un 16e de Coupe de France à 48 ans, cela t'inspires quoi ?
J'ai vu ça la dernière fois, j'étais choqué ! C'est un truc de fou, c'est magnifique. Si vous l'avez un jour au téléphone, vous lui direz chapeau de ma part. En plus il a encore des stats, c'est un tueur à gage !
Et jusqu'où compte aller Mickaël Darnet ?
Pour être honnête, je n'aime plus le football comme avant. Je trouve que la mentalité a changé, les insultes et les mauvaises paroles se font trop entendre sur le terrain. Aujourd'hui, le football aide ma famille et à payer le loyer donc j'en profite parce que la vie est dure et de plus en plus chère. Mais si demain je n'ai plus cet aspect financier à côté, je n'irais pas au foot pour le plaisir. C'est impossible mais c'est ma façon de voir. Les entraînements, déplacements, ne pas voir ses enfants représentent désormais des sacrifices pour moi. Je continue pour subvenir à leurs besoins et si je ne gagnais pas cet argent, je ne jouerais déjà plus. Il faut se rendre compte que jouer en National 3, cela demande beaucoup d'énergie même à notre petit niveau.
La passion a disparu ?
J'aime jouer les matches, j'adore être avec mes collègues et c'est ce qui me manquera le plus quand j'arrêterai. L'ambiance, les blagues, les victoires... en tant que compétiteur il faudra que je retrouve ces sensations ailleurs, c'est sûr. Mais l'amour du ballon... j'ai le sentiment qu'il n'existe plus. Avant, des joueurs pouvaient passer 20 ans dans le même club. Maintenant, tout dépend du fixe, des primes. Moi le premier, j'ai déjà changé de club parce que financièrement ça m'arrangeait davantage. Depuis quatre, cinq ans ma vision a beaucoup changé. Je ne sais pas comment ça se passe dans les autres régions, mais c'est le constat que je fais pour la poule N3 Corse-Méditerranée.
Il ne se fait pas qu'ici...
Pour vous donner un exemple, j'ai fait 17 années à l'AS Cannes dans ma vie. J'ai le sang rouge et blanc et le dragon tatoué sur la cuisse. Je suis un fanatique du club et j'allais au stade quand j'avais 5 ans. De façon globale, quand tu ressens de l'amour pour un club et que tu vois le peu de reconnaissance que tu as en retour... Tout ça finit par te dégoûter. Certains diront peut-être que je dis des conneries mais c'est mon opinion, ma façon de voir les choses.
Propos recueillis par Thomas Gucciardi
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