24 décembre | 17h59
Thomas Dersy : "On a partagé des choses extraordinaires"
Co-fondateur d'Actufoot avec Cédric Messina en décembre 2001, Thomas Dersy (43 ans) est aujourd'hui directeur général de la SAS du RC Grasse. À l'occasion de notre vingtième anniversaire il revient à son tour sur les premiers pas d'Actufoot. Souvenirs.
Thomas, Actufoot célèbre actuellement son vingtième anniversaire, tu en es le co-fondateur avec Cédric Messina qui nous a également accordé une interview cette semaine, on imagine qu’en la lisant tu as dû voir beaucoup de souvenirs remonter…
Ce qui m’a surpris en la lisant, c’est de me rendre compte à travers son interview qu’on était déjà au vingtième anniversaire. Je me suis retrouvé surpris et heureux de voir le chemin parcouru par le média, mais aussi par tous ceux qui y ont contribué, quel que soit leur rôle et leur implication dans cette aventure. Quand on entreprend on regarde le plus souvent devant, mais ça fait du bien de pouvoir se retourner et d’apprécier à sa juste valeur ce que l’on a pu accomplir, partager ou vivre.
Au sein de la structure nous étions une équipe et quelque part les lecteurs étaient nos supporters.
Le partage c’est ce que tu retiens en premier quand tu penses à la genèse d’Actufoot ?
Exactement. À vingt ans on ne pense pas à ça, mais la plus grande richesse est dans le partage. On a eu des réussites, des échecs, mais on a partagé des choses extraordinaires et aujourd’hui, que ce soient les associés, les salariés, les stagiaires et tous les autres, nous avons tous en mémoire les souvenirs des bouclages à pas d’heure, quand on mangeait les pizzas de Léo Mallo ensemble au bureau. Ces moments-là nous lieront à vie. Mais au-delà de l’aventure qu’on a partagée ensemble, je continue de me rendre compte que cette notion de partage allait bien au-delà de nous. Les amateurs et amoureux du football du 06 se souviennent d’Actufoot.06 et aujourd’hui encore on me parle de ce journal qui sortait en kiosque le vendredi. Au sein de la structure nous étions une équipe et quelque part les lecteurs étaient nos supporters.
Au-delà de la réussite d’Actufoot, de quoi es-tu le plus fier par rapport à cette période de ta vie professionnelle ?
C’est d’être encore en lien avec de nombreuses personnes qui ont fait ce média et de collaborer aujourd’hui avec des jeunes stagiaires de l’époque qui se sont accomplis professionnellement et me parlent encore de leurs débuts chez nous. Nous avons contribué à les faire grandir et ils m’en parlent encore. Avec Actufoot ils sont rentrés dans le monde du travail par une porte saine, où l’on prônait des valeurs d’efforts car on leur demandait beaucoup. Je ne vais pas les citer pour n’oublier personne, mais j’ai une pensée pour chacun d’entre-eux. Nous sommes parfois amenés à nous recroiser et c’est toujours un plaisir d’échanger le passé, de voir ce que chacun est devenu, mais aussi de voir à quel point cette aventure nous a lié à vie.
Revenons au tout début, comment vous est venue l’idée avec Cédric Messina de créer Actufoot.06 ?
Le premier souvenir qui me revient c’est un coup de fil. Cédric était avec Jean-Christophe Gaffory, un ami commun, et ils m’ont appelé pour me dire : « On a une idée, vient pour qu’on en parle. ». Je les rejoins dans l’appartement de Cédric, on parle de créer un journal sur le foot local sans avoir de nom en tête à ce moment-là. Ensuite on se quitte en se répartissant des tâches pour commencer à avancer sur le projet et on se retrouve une semaine plus tard. « JC » était encore pris dans son cursus STAPS, mais avec Cédric nous étions déjà à fond. Du coup nous y sommes allés à deux et avec l’aide précieuse de quelques amis et de nos familles. Avec Cédric nous étions en troisième année d’IUP de management sportif et à quelques mois de la fin de l’année scolaire il fallait trouver une idée de mémoire. Je me suis servi de cela pour avancer sur une sorte de business plan en choisissant le thème de mon mémoire sur la viabilité d’un journal sur le football azuréen. En parallèle on a continué de bosser sur le projet, le nom d’Actufoot est arrivé, en septembre je présentais mon mémoire et en décembre le premier numéro d’Actufoot sortait.
À tous les niveaux nous avions des profils improbables, mais nous étions entraînés par la force qu’a rapidement généré le média.
Cédric nous a confié que beaucoup de personnes vous déconseillaient pourtant de vous lancer dans un tel projet…
Effectivement. Un ami de mon père était directeur général du Midi-Libre à cette époque et avait eu quasiment le même poste au Monde. Nous avions été le voir à Montpellier pour lui parler de notre projet et il nous avait dit de garder nos petites économies pour faire autre chose. C’est là qu’il nous avait donné ce fameux chiffre : 96% des médias qui se créaient au début des années 2000 ne passaient pas la première année. Ce qui est beau dans cette histoire c’est l’insouciance de la jeunesse qui nous fait y aller quand même. Et cela a été un formidable accélérateur professionnel. Nous n’avions aucune expérience et nous nous sommes retrouvés à prendre le téléphone pour appeler tous les président de clubs. Nous savions aussi que nous dérangions un peu et que chaque semaine le journal pouvait ne pas sortir le vendredi. Comme Cédric l’a dit nous n’avions pas de réseau, peu de moyens, il a fallu enfoncer des portes pour que cela fonctionne.
As-tu un souvenir précis qui t’a particulièrement marqué ?
C’est un dossier que nous avions fait sur le manque de terrains à Nice pour le foot amateur. L’article était sorti le vendredi et avait provoqué un bel engouement. Le mercredi suivant, les clubs niçois et leurs jeunes licenciés avaient manifesté en tenue sur l’Avenue Jean-Médecin pour dénoncer ce manque d’infrastructures qui les handicapaient grandement à l’époque. Cet évènement nous a fait basculer dans le monde des grands. Cela faisait des mois que l’on essayait d’avoir la ville de Nice comme partenaire, mais on n’y arrivait pas. Sauf qu’une semaine après la manifestation, le service communication de la mairie nous a appelé et le vendredi suivant nous étions dans le bureau du maire. Après cela nous avions une fois par mois une dernière de couverture dédiée à la ville et nous avons aussi travaillé main dans la main sur de jolis projets, comme le Prix Educafoot qui récompensait les meilleurs éducateurs de jeunes de Nice.

Les clubs amateurs du 06 ont réservé un super accueil à Actufoot à l’époque, mais aussi les clubs professionnels…
C’est vrai. D’ailleurs on pouvait avoir de très jeunes journalistes stagiaires qui se retrouvaient une semaine après leur arrivée à interviewer des joueurs de renommée internationale. C’est aussi ce qui faisait notre force. Sans expérience, pour certains sans formation de journalisme, nous sommes entrés dans le jeu avec beaucoup de passion et de spontanéité. À tous les niveaux nous avions des profils improbables, mais nous étions entraînés par la force qu’a rapidement généré le média. Nous étions créatifs aussi, même sur le plan commercial. J’en profite pour rendre hommage au premier commercial du journal, Philippe Cassaigne, qui a écumé tous les quartiers de Nice pour vendre de la publicité ultra localisée sur Actufoot.06. Chaque semaine on faisait l’équipe des entrepreneurs d’un quartier qui soutenaient l’OGC Nice sur la base d’une photo d’équipe où l’on remplaçait la tête des joueurs par celles des commerçants ou des artisans que Philippe avait rencontrés. Nous avions créé un club des partenaires, avec des soirées mémorables et des amitiés qui sont allées bien au-delà du journal.
Pour ta part, bien qu’étant supporter de l’OGC Nice, tu t’es retrouvé par la suite à travailler successivement pour l’AS Cannes, l’AS Monaco et aujourd’hui au RC Grasse…
J’étais supporter de Nice, mais j’étais surtout passionné de foot. Je n’étais pas autant impliqué que Cédric qui était un ultra. J’allais au Stade du Ray, mais aussi à Coubertin ou au Stade Louis-II. J’adorais ça. La suite, cela n’a été qu’une succession d’opportunités et de rencontres, un peu comme l’histoire d’Actufoot, ce qui m’a permis de rester dans ce milieu qui me passionne.
L’Ouest du 06 est une terre de foot et il y a de très belles choses à y construire.
Aujourd’hui tu es donc directeur général de la SAS du RC Grasse, comment-as tu rejoint ce club ?
Encore une histoire de coup de fil. Guillaume Mermet-Maréchal, que j’ai connu à Monaco, m’a appelé pour me mettre en contact avec Jean-Philippe Cheton qui souhaitait s’investir dans le football. À l’époque je faisais un peu de consulting donc je l’ai rencontré et il m’a parlé de cette envie qui était la sienne. Nous avons commencé à travailler sur le sujet et j’y ai vite perçu une chance de pouvoir mettre en place la vision qui était la mienne et qui était née de mes expériences passées. J’avais eu quelques responsabilités à Cannes, mais cela concernait uniquement la communication, le marketing et le commercial. À Monaco qui est un grand club, les tâches sont aussi beaucoup plus cloisonnées. Là il y avait tout pour mettre en place un projet identitaire, avec une majorité de joueurs du coin, un staff local et une régie locale en lien avec des entreprises du bassin Cannes-Grasse. C’est un régal de pouvoir mettre en place cela et d’avoir intégré cette belle famille qu’est le RC Grasse. Nous vivons des choses très fortes avec Jean-Philippe, le staff, les joueurs et les bénévoles de l’association. C’est un vrai projet dans le sens où si l’on a des ambitions, le projet n’est pas la montée. Dans notre vision la montée c’est la conséquence du projet.

Depuis 2019, Thomas Dersy est directeur général du RC Grasse, club qui évolue dans le Groupe C de National 2.
On te sent accompli dans ce rôle…
J’ai vécu de grands moments à Cannes, même si je considère qu’il y a eu un énorme gâchis là-bas et que la mémoire de Saïd Fakhri n’a pas été honorée avec ce dépôt de bilan qui a suivi la belle épopée de 2014 en Coupe de France. Je suis persuadé que lui vivant les choses ce seraient passées tout à fait différemment. C’était vraiment un grand Monsieur. À Monaco aussi j’ai vécu des émotions sportives exceptionnelles, mais pour rien au monde je n’échangerais ce qui je vis actuellement au RC Grasse. Cette aventure me fait penser à Actufoot vingt ans plus tôt. Il y a un vrai état d’esprit collectif et familial, beaucoup de partage. Aujourd’hui nous luttons pour la première place du Groupe C, mais quoi qu’il advienne de cette saison, accession ou pas, chaque personne qui la vit de l’intérieur s'en souviendra toute sa vie.
Comme tu nous le rappelles, en 2014 tu as vécu une épopée exceptionnelle avec l’AS Cannes en Coupe de France. Début janvier le club rouge et blanc disputera un 16e de finale dans cette même compétition. Cela doit te rappeler quelques souvenirs ça aussi…
Forcément. Je leur souhaite d’ailleurs de vivre les mêmes émotions qu’il y a sept ans en atteignant les 8es de finale. Même si aujourd’hui je suis à Grasse et très heureux d’y être, cela fait plaisir de voir l’AS Cannes vibrer à nouveau. Cela montre aussi que l’Ouest des Alpes-Maritimes mérite un club professionnel. Un club qui doit selon moi s’appuyer sur les forces locales pour émerger. Je le dis sans me positionner en tant que Grassois ou Cannois. C’est un constat. L’Ouest du 06 est une terre de foot et il y a de très belles choses à y construire.
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