27 octobre | 18h00
Youssouf Fofana : « Je peux aussi passer des coups de gueule »
Perçu comme l'un des ambianceurs du vestiaire monégasque, Youssouf Fofana ne s'en est pas moins affirmé comme un élément important malgré son jeune âge (22 ans). Dans un entretien accordé à Actufoot, Radio Monaco et Monaco Tribune, le milieu s'est livré sans filtre sur son parcours atypique et sur son début de saison en demi-teinte sur le Rocher.
A l'occasion d'un portrait qu'Actufoot t'avait consacré en novembre 2018, ton premier éducateur à l'Espérance Paris 19e, Morad Djeddi, avait raconté une anecdote particulièrement intéressante : "Youssouf était un jeune dégourdi. Je me souviens d'un match à Epinay-sur-Seine où les parents étaient absents. Il est rentré tout seul et s'est occupé de toute l'organisation et de la logistique". Le signe d'une certaine maturité, déjà ?
Pour vous raconter, on avait une équipe vraiment familiale, les joueurs venaient tous du même coin. Je crois que celui qui habitait le plus loin de chez moi était à seulement deux kilomètres. Quand on allait au foot, on se retrouvait à cinq ou six dans le métro ou à pied, et on allait et repartait ensemble des matches. Un jour, à l'extérieur, le coach avait dû nous laisser. J'étais vraiment impliqué et avec l'équipe, on avait rassemblé les maillots puis on était rentrés seuls en RER d'Epinay à Paris. Je crois qu'on avait fraudé d'ailleurs (rires). Ensuite, on avait mis les maillots dans le lave-linge puis on est partis manger avant de rentrer chez nous. On était tous très matures.
Contrairement à beaucoup de footballeurs issus des centres de formation, ton parcours s'est essentiellement fait au niveau amateur avec quelques embûches en cours de route, comme cet échec à l'INF Clairefontaine. En quoi ont-ils forgé l'homme et le footballeur que tu es aujourd'hui ?
J'ai commencé à 5 ans et quand j'ai intégré l'INF Clairefontaine à 13 ans, j'ai compris que le foot n'était pas qu'un loisirs mais un métier. C'était un peu tard malheureusement, donc je suis revenu en région parisienne (à la JA Drancy en U17 DSR puis U19 Nationaux). Contrairement à d'autres, j'ai eu des échecs très tôt qui m'ont forgé une carapace, un certain caractère et font l'homme que je suis. Je sais déconner mais j'ai aussi beaucoup d'exigence envers moi-même, et on a pu le lire sur mon visage quand j'étais remplacé lors de certains matches cette saison.
On pense notamment à cette sortie précoce à Clermont où tu rentres directement au vestiaire dès la 37e minute...
J'avais le choix entre rester sur le banc sagement, donner l'image à toute la France d'un mauvais garçon en shootant dans une bouteille, ou rentrer au vestiaire. Mon choix a été mal interprété et c'est vrai que c'était pas la meilleure chose à faire. La saison dernière, j'avais shooté dans une bouteille et c'était mal passé à juste titre. Dans tous les cas, je n'ai pas eu le comportement à avoir et je sais que je dois travailler là-dessus.
Frustré d'avoir été sorti à la 37e par Niko Kovac au stade Gabriel-Montpied de Clermont, Youssouf Fofana était rentré directement au vestiaire. Depuis, le milieu a digéré et revient petit à petit à son meilleur niveau (Crédit photo : Icon Sport)
Quelles sont les personnes qui comptent le plus à présent dans ta vie d'homme ?
Ce sont mes parents. Dans le monde dans lequel je vis, ils sont "innocents". C'est-à-dire qu'ils ne me voient pas comme un footballeur mais vraiment comme leur enfant. Ils m'envoient faire les courses, alors que ça ne viendrait peut-être pas à l'esprit d'une autre personne. C'est super important notamment quand on enchaîne les victoires, comme la saison dernière, car tu peux vite gonfler. Des joueurs sont là dans le vestiaire pour faire attention aux excès de confiance mais c'est bien de pouvoir rentrer à la maison, au quartier et ressentir que tu es avant tout le fils, l'ami qu'ils ont toujours eu. J'ai eu la chance de grandir dans un entourage favorable que ce soit du côté de ma famille ou de mes amis et je sais que ce n'est pas le cas de tout le monde. Toutes ces personnes m'ont poussé à poursuivre et réaliser mon rêve. Je leur dois tout.
Tu as signé ton premier contrat professionnel il n'y a pas si longtemps (à Strasbourg en 2018) mais on a l'impression que tu fais déjà partie des vieux briscards à l'ASM...
J'ai signé tard dans un club professionnel mais j'ai signé tôt mon premier contrat professionnel. Quand je suis arrivé à Strasbourg, j'avais une ligne directrice et je ne l'ai pas perdue. J'ai gardé les pieds sur terre parce que le contrat pro n'était pas une fin en soi, j'ai continué à bosser et je me suis retrouvé à Monaco un an et demi plus tard. Là, je suis dans le rêve et il faut le vivre !
Boute-en-train quand il faut, mais croyez-moi, je peux aussi passer des coups de gueule en français, en anglais et même en espagnol ! Tout le monde me comprend. Quand c'est bien, je le fais savoir à mes coéquipiers mais quand ça ne va pas, je sais aussi me faire entendre. Si on me voit rigoler, c'est de bon augure on va dire (sourires).
Youssouf Fofana
On a le sentiment que tu fais partie des boute-en-train dans le vestiaire. C'est comme ça que tu te vois ?
Boute-en-train quand il faut, mais croyez-moi, je peux aussi passer des coups de gueule en français, en anglais et même en espagnol ! Tout le monde me comprend. Quand c'est bien, je le fais savoir à mes coéquipiers mais quand ça ne va pas, je sais aussi me faire entendre. Si on me voit rigoler, c'est de bon augure on va dire (sourires).
L'AS Monaco sort d'une belle semaine avec deux succès à Eindhoven puis contre Montpellier à Louis II et donne l'impression de retrouver le collectif de la saison dernière. A quoi attribues-tu les difficultés rencontrées en début d'exercice ?
Le début de saison n'était pas si mauvais que ça, il s'est joué sur des détails. Une fois qu'on réussit à marquer, on joue plus libérés et on arrive à tuer le match cmme contre Montpellier (victoire 3-1 dimanche dernier). C'est ce qui fait notre force et on retrouve petit à petit notre confiance. On va mettre nos difficultés sur le dos de l'enchaînement des matches, on a une équipe jeune et c'est une première pour beaucoup de jouer tous les trois jours depuis le 3 août. On fait partie des équipes de Ligue 1 qui ont le plus joué depuis le début de saison. Ça fait partie du foot et j'espère que c'est pour nous le début d'une grande carrière avec des matches tous les trois jours.
La concurrence est assurément plus dense que la saison dernière dans l'entrejeu avec notamment l'émergence de Matazo, l'arrivée de Jean Lucas. Comment ressens-tu la situation ?
Les résultats du début de saison ne n'ont pas mis en bonne posture, c'est sûr. Je m'en veux un peu, aussi, parce que j'ai donné l'occasion au coach de m'enlever à certains matches. Je n'ai pas fait ce qu'il fallait à certains moments et il y a de la concurrence. On est à l'AS Monaco, ça faisait longtemps qu'il n'y avait pas eu un groupe aussi étoffé, la preuve contre Montpellier avec beaucoup de titulaires sur le banc. Ça doit faire plaisir au public de voir que l'équipe peut rester constante lorsque plusieurs joueurs changent d'un match à l'autre.
On a deux cyborgs devant (Ben Yedder et Volland) et un espoir (Myron Boadu) qui a de grandes chances de suivre leurs traces. Je me contente de faire le job à mon poste pour l'instant. Je sais que le foot en 2021, c'est les statistiques. Une petite stat' qui ressort tous les trois matches, ce serait bien
L'ambiance dans le vestiaire reste au beau fixe malgré cette lutte pour gagner sa place ?
Ça reste la même chose. Je parlais déjà de Matazo la saison dernière et je disais qu'il ne fallait pas évoquer le milieu de terrain comme seule propriété de Fofana et Tchouaméni. Vous voyez qu'il est là aujourd'hui, donc je n'avais pas tort. Il fait beaucoup de performances et je suis content pour lui.
Il t'arrive de le conseiller ?
Eliot est un jeune qui écoute, bosse et donne envie de l'aider. Tu sens qu'il veut progresser. Je lui donne des conseils comme je peux en donner à Aurélien (Tchouaméni), qui m'en donne aussi, et comme Cesc (Fabregas) en donne à tout le monde (rires). Je me suis vu en lui, et si on m'a donné les conseils, je me devais de le faire pour lui.
Entre gagner un duel, réussir un tacle, marquer un but, quel est le geste qui te donne le plus de satisfaction ?
Je pense que c'est une transition défensive-offensive. Quand je vois qu'on récupère le ballon et que derrière, l'équipe arrive à marquer, ca me fait plaisir. Marquer un but, ça me manque, mais ce n'est pas forcément mon métier. On a deux cyborgs devant (Ben Yedder et Volland) et un espoir (Myron Boadu) qui a de grandes chances de suivre leurs traces. Je me contente de faire le job à mon poste pour l'instant. Je sais que le foot en 2021, c'est les statistiques. Une petite stat' qui ressort tous les trois matches, ce serait bien (sourires).
Ridha Boukercha et Thomas Gucciardi
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