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7 février | 19h45

Ilyes Chaïbi : « À Monaco, j’étais trop pressé et j’ai manqué de patience »

Retrouvez le large entretien d'Ilyes Chaïbi, attaquant formé à l'AS Monaco, évoluant aujourd'hui au Thonon Évian Grand Genève FC.

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Originaire de Bron en banlieue lyonnaise, c’est à quelques centaines de kilomètres de ses terres natales que le buteur brondillant a connu le monde professionnel. Formé à Évian Thonon Gaillard puis à l’AS Monaco, Ilyes Chaïbi s’éclate finalement en N3 avec le Thonon Évian Grand Genève FC, anciennement l’ETG. Actuellement meilleur buteur de sa poule avec 15 buts, l’attaquant ne devrait pas rester très longtemps en Haute-Savoie. Entretien.


Tu es actuellement le meilleur buteur de la N3 AURA avec 15 buts. Comment expliques-tu tes bonnes performances cette saison ?

Tout d’abord, je me sens bien physiquement. Le fait d’avoir moins de blessures qu’avant m’a permis de très bien commencer la saison. Mais ce qui m’aide, c’est surtout la confiance que j’ai de la part du club et du staff. On a entamé une nouvelle saison avec Bryan Bergougnoux en tant que coach et humainement je m’entends super bien avec lui. Il me fait vraiment confiance et j’ai besoin de ça. Tous ces ingrédients réunis m’ont permis de bien performer jusque-là.

Quelle relation as-tu avec ton entraîneur, qui comme toi, est un ancien attaquant professionnel ?

Elle est très bonne. Il comprend parfaitement ce que les avants-centres peuvent endurer pendant un match ou pendant une carrière et c’est vraiment un plus pour moi. Comme je l'ai dit, on fonctionne beaucoup à la confiance avec lui, mais ça vaut aussi pour tous mes coéquipiers. C’est d'ailleurs pour cela que la mayonnaise a bien pris cette saison et qu'on affiche de telles performances collectives.

C’est donc un entraîneur qui est proche de ses joueurs …

Exactement ! Il y a des coachs qui n’ont peut-être pas ce rapport humain avec les joueurs, mais ce n’est pas le cas de Bryan. Lui, il est avec tout le monde, que ce soit avec les joueurs qui jouent beaucoup ou ceux qui jouent moins. Il sait faire la part des choses et dans son discours, il est toujours cohérent. C’est un entraîneur qui tend la main et qui marche au mérite. Avant lui, il y a peut-être eu quelques injustices ici, mais depuis sa prise de fonction, il a su remettre de l’ordre et aujourd’hui il en récolte pleinement les fruits.

Vous êtes actuellement leader de votre poule, avec une longue série d’invincibilité (7 matches) et une seule défaite au compteur. C’est l’effet Bergougnoux ?

Tout le monde fait du bon boulot et on a tous progressé mentalement. Mais c’est sûr que le travail de Bryan nous a énormément aidés parce qu’il a su créer un bon groupe de copains. Avec son staff, ils y sont pour beaucoup… Ils nous ont insufflé leur état d’esprit donc on les suit à fond.

Le Thonon Évian Grand Genève FC est un club que tu connais bien puisque tu empilait déjà les buts ici étant plus jeune. Penses-tu que ce retour aux sources il y a maintenant 2 ans et demi a été un choix payant ?

La première fois que je suis arrivé ici j'avais 14 ans, donc oui, je connais bien les lieux et c'est vrai que je marquais beaucoup de buts (rires). C’est vraiment un choix qui m’a fait du bien. Quand je suis revenu, le club était en R1 et j’avais quand même des pistes avec deux ou trois clubs de National. Le président Patrick Trotignon qui était déjà là aussi à l'époque m’a appelé et je n'ai pas hésité. J’ai écouté mon cœur puis j’ai signé. C'était un sacrifice, mais aujourd’hui ça paye car j'ai pu retrouver la stabilité dont j’avais besoin pour performer. Mais de toute façon, je savais pertinemment que je me sentirais bien ici.

À l’époque, tes performances ne passent pas inaperçues puisque tu intègres dans la foulée le centre de formation de l’AS Monaco. En quoi ton passage en principauté t’a forgé ?

Ça m’a beaucoup fait grandir parce que c’est là-bas que j’ai vraiment connu le haut niveau. La première année, j’ai eu du mal, car je passais de la catégorie jeune à senior. Mais je suis quand même resté quatre années sur le Rocher donc j’ai eu le temps de voir à quoi ressemblait un club professionnel, mais surtout, j'étais dans les coulisses du « Grand Monaco ». Aujourd’hui, je suis fier de dire que j’étais à l’ASM pendant cette période, avec tous ces grands joueurs, le titre de champion de France, l'aventure en Ligue des champions ...


Avec le recul, qu’est ce qu’il t’a manqué pour avoir une carrière plus importante à ce moment-là ?

Je dirais que c’est avant tout un manque de maturité. J’étais jeune, sans aucune responsabilité, je vivais seul et je n'en faisais un peu qu'à ma tête. J’ai fait aussi quelques mauvais choix. Par exemple, lors de ma deuxième saison à Monaco, je finis meilleur buteur de la N2, je fais 10 bancs et une entrée en Ligue 1. À ce moment-là, je voulais directement jouer une saison complète avec l'équipe première. Mais quand je suis parti en prêt à Ajaccio la saison suivante, je pense que c’est un mauvais choix. Je ne regrette pas mon aventure là-bas parce que j'ai été très bien accueilli par le club et j’ai pu découvrir le monde pro en faisant partie cette fois de l'effectif. Mais avec le recul, je me dis que j’aurais dû rester une année de plus à Monaco. Si j’avais confirmé les bonnes performances de l’année précédente, mon aventure à l’ASM aurait pu être différente. Mais j’étais trop pressé et j’ai manqué de patience.


En tant qu’attaquant, Berbatov et Falcao m’ont beaucoup impressionné

À l’ASM il y avait des grands joueurs à ton époque. Lequel t’a le plus marqué ?

Sans hésiter, je te dis Bernardo Silva. Techniquement et dans l’intelligence de jeu, il n’y avait pas meilleur que lui. En plus, on ne le connaissait pas trop quand il est arrivé du Portugal. C'est vraiment un joueur qui a explosé à Monaco et quand je le vois aujourd’hui à Manchester City, je ne suis même pas étonné. Je me dis même que c’est logique (rires). En le côtoyant tous les jours, on voyait qu’il progressait à chaque séance. Puis quand il s’est imposé comme étant un cadre durant la saison du titre, il était inarrêtable. Mais il y en avait tellement de bons joueurs… En tant qu’attaquant, Berbatov et Falcao m’ont beaucoup impressionné aussi. Quand tu les regardes, ne serait-ce qu’à l’entraînement, tu sens tout de suite que c'est le niveau Ligue des champions, Coupe du monde... C’étaient vraiment des grands joueurs de football.

Et Mbappé ?

Oui Kylian aussi. Dès son plus âge, l’ASM savait très bien ce qu’il avait entre les mains. L’année où j’arrive il jouait en U19 avec nous alors que c’était un U17 et il était déjà le meilleur buteur... Tu voyais direct que c’était un diamant brut que Monaco était juste en train de polir pour qu’il explose. Quand il a vraiment pris son envol, c’est allé très vite. Il était en U19, après il a fait 3/4 matches avec la CFA et boum ... Il était déjà en Ligue 1 (rires). Mais son monde à lui, c’était vraiment le groupe pro. C'était flagrant. Il était fait pour ça. Quand il prenait le ballon, même les anciens le regardaient jouer parce qu’ils étaient impressionnés.

Te souviens-tu avoir reçu des conseils d’anciens qui t’ont marqué ? Peut-être de la part de Falcao ou Berbatov qui sont des buteurs comme toi…

Non pas vraiment. Les deux sont des joueurs assez timides. Il y avait la barrière de la langue aussi qui ne facilitait pas les choses, mais on sentait le respect mutuel. Moi, en tant que jeune, je me faisais discret avec eux et j’apprenais simplement en les regardant jouer. J’analysais leur placement, leur appel de balle, et à force de manger des séances et encore des séances à leurs côtés, j'ai beaucoup appris. Je pense qu'inconsciemment cela me sert encore aujourd’hui dans ma carrière. Mais nous les jeunes, on échangeait beaucoup avec Ricardo Carvalho. C’était une crème. Il nous posait plein de questions sur notre parcours et il s’intéressait à nous. C’est lui qui nous donnait les clés et les meilleurs conseils pour réussir dans le monde pro.

Ensuite, tu es donc parti en prêt à Ajaccio, mais tes performances n’étaient pas à la hauteur de ton talent…

L’ACA m’avait porté beaucoup d’intérêt. Mais je pense que je n’avais pas encore les caractéristiques nécessaires pour jouer en Ligue 2. Mon jeu n’était pas encore prêt pour ce type de championnat. Moi, j’étais plus un joueur de ballon. À Évian et à Monaco, j’ai été formé comme ça. Donc je pense que j’ai mis les pieds trop tôt en Ligue 2. Je n’avais pas encore le coffre pour performer et faire la différence. Mais aujourd’hui, avec plus d’expérience, et après toutes les désillusions que j’ai pu connaître dans le foot, je pense que je suis apte. J’y ai déjà goûté et je me suis peut-être cassé les dents, mais si demain j’ai l’opportunité de retrouver une L2, je pense que ça se passera beaucoup mieux pour moi, et que ça ne sera pas le Ilyes de 2017.

Les désillusions, ce sont tes expériences en Autriche et en Algérie ...

L’Autriche, c’était un prêt de six mois qui commençait l’hiver. Quand j’arrive sur place, je suis super content. Innsbruck est une ville magnifique que j'ai beaucoup aimée. Mais très vite, je me suis fait les ligaments de la cheville, donc fin de saison… C’est cette blessure qui a gâché le prêt. Pour ce qui est de l’Algérie. C’est mon ancien coach Bernard Casoni qui était en poste au MC Alger qui m’a appelé parce qu’il recherchait un attaquant de double nationalité. Je suis parti à 90 % pour lui, et au bout de trois semaines, il a été viré (rires).

Finalement depuis ton départ de Monaco, c’est la première fois que tu prends plaisir à jouer au football avec Évian ?

(Rires) J’en parlais justement avec Corentin Tirard avec qui j’ai joué à Évian à l’époque, puis à Monaco, avant qu’on se retrouve ici en 2019, et c’est exactement ce que je lui ai dit. Personnellement, la dernière fois que j’ai pris goût à jouer au foot, c’était quand j’avais inscrit les 24 buts en N2 avec l’ASM. De son côté, Corentin a aussi eu quelques désillusions à Grenoble et en Grèce avant de « revivre » avec le Thonon Évian Grand Genève FC.

Quelles sont tes ambitions désormais ?

Aujourd’hui, j’ai envie de monter avec Évian. C’est mon objectif numéro 1. Après, à titre personnel, c’est de continuer à mettre des buts et terminer meilleur buteur de la poule. Ensuite, on verra cet été ce qu’il en est au niveau des transferts. J’ai eu quelques sollicitations cet hiver, mais j’ai préféré rester au club.


Quels clubs sont venus aux nouvelles ?

Le Red Star m’a fait une vraie proposition et j’ai eu plusieurs intérêts de clubs de première division à l’étranger. Mais pour le moment, je termine ma saison ici et on verra tout ça cet été. Je ne ferme la porte à aucun projet. Le club ne m’a pas laissé partir cet hiver, mais j’ai un bon de sortie dans six mois. Je ne voulais pas aller inutilement au clash avec le Thonon Évian Grand Genève FC par respect pour tout le monde ici. Je sais désormais qu’il faut être patient dans le football, et j’ai vraiment à cœur de finir le travail qu’on a commencé tous ensemble avec le groupe et le coach. Mais quoiqu’il arrive, cet été je vais choisir ce qui me semble être le meilleur pour ma famille et moi.

Propose recueillis par Ahmet RAYMAN

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