6 mars | 10h30
Le District du Grand Vaucluse, berceau d'une innovation dans l'arbitrage !
Actufoot s'est entretenu avec Chaib Kinnous, président de la commission de discipline du District du Grand Vaucluse et arbitre de niveau régional qui a été équipé pour la première fois d'une caméra embarquée lors d'un match de Coupe Grand Vaucluse. Une expérience révolutionnaire qui fut une grande réussite. (Crédit photo : DR)
Chaib, pouvez-nous expliquer comment cette idée d'équiper un arbitre d'une caméra embarquée a-t-elle mûrie au sein de votre District ?
Cette initiative m'appartient, j'ai fait une étude il y a quelques années sur les phénomènes de violence dans le football et cette saison, lors d'un séminaire contre la violence organisé par le District j'ai soumis l'idée d'équiper d'une caméra embarquée les arbitres lors de matches que l'on appelle "à risque" ou "à enjeu". Cette étude a été validé par le comité directeur et dès le week-end du 24-25 février, j'ai officié sur le match de quart de finale de Coupe Grand Vaucluse opposant l'Espérance Sorguaise (D2) et le Sporting Courthézon-Jonquières (R2) équipé de cette caméra. Nous avons observé une augmentation de 155% d'augmentations des affaires soumis à instructions, c'est-à-dire d'une extrême gravité. Nous sommes le premier District de la région à mettre en avant cette initiative et elle est pour moi très prometteuse pour l'avenir.
Dans la pratique, qu'avez-vous pu observer au niveau du déroulement du match et du comportement des différents acteurs autour de la rencontre ?
Nous l'avons fait deux fois, le samedi soir où j'ai officié et le lendemain sur un autre quart de finale (Isle BC - Pertuis USR) où j'ai équipé l'arbitre central de la caméra également en étant son assistant. En effet, il y a vraiment une retenue, les joueurs restent à une distance plus importante de l'arbitre, s'adressent à lui avec beaucoup plus de respect en faisant très attention à ce qu'ils disent. Dans mon match, il y a eu un attroupement et généralement dans ce type d'évènements, il y a des mots injurieux ou des bousculades, et là il n'y a rien eu de tout ça. Unanimement, avec les capitaines et les représentants de club, nous nous sommes dits que c'était une bonne chose puisque lorsqu'on se sait filmer, on adopte un comportement différent, on fait plus attention à comme on agit.
Nous pouvons faire le lien avec le monde professionnel, où les joueurs sont constamment filmés et sont donc moins enclins à s'emporter...
Exactement, vous l'avez souligné, le football professionnel est plus propre d'une part parce qu'il y a beaucoup d'argent en jeu et d'autre part parce que tous les matches sont filmés et donc les joueurs ont intérêt à se tenir à carreaux pour ne pas être sanctionné par les instances. Alors oui, c'est un bon exemple, on se retient lorsqu'on se sait filmé et on va même faire plus attention à l'adversaire. On ne protège pas uniquement les arbitres, on réduit également les agressions entre joueurs ou envers n'importe quel acteur de la rencontre. Même l'arbitre va faire attention à sa manière de parler aux joueurs, on a déjà pu voir certains ne pas s'adresser correctement au joueur, ça peut arriver !
Des discussions avec d'autres instances supérieures, comme la Ligue Méditerranée par exemple, ont déjà débutées pour mettre en place cette initiative à plus grande échelle ?
Le président du District Grand Vaucluse et son comité directeur ont acheté dix caméras embarquées, donc ils ont totalement validé le projet. Si vous voulez, la première était un test, j'ai fait un retour sur l'utilisation et sur le déroulement de la rencontre et le District a investi directement dans neuf autres. Elles seront donc mises à disposition chaque week-end sur le territoire du District Grand Vaucluse uniquement pour le moment. Pour le moment, seul le District des Alpes nous a contacté pour avoir des informations. Nous sommes persuadés qu'avec la direction que prennent les faits, car nous avons été contacté par de nombreux médias, et la communication qui va se faire autour, les autres districts voisins, et pourquoi pas la Ligue, vont se pencher sur cette initiative. La violence n'est pas un fléau propre uniquement au Grand Vaucluse mais c'est un fléau général.
Nous parlons de ce fléau qu'est la violence, en plus de cette initiative, comment gérez-vous l'augmentation de ces phénomènes extrêmement regrettables ?
Le président du District, Christophe Benoît, et son Comité Directeur ont mis deux autres dispositifs en place avant l'utilisation de la caméra embarquée. La première c'est qu'il y a désormais trois arbitres sur les rencontres U18-U19, au lieu d'un seul, et depuis nous n'avons plus de problèmes sur ces catégories qui étaient très compliquées avant. Ensuite, un protocole d'avant-match a été mis en place, une réunion est faite avec les présidents, capitaines, entraîneurs et officiels pour être partenaires et refuser la violence. Si elle arrive cependant sur ou en dehors du terrain, nous nous engageons à la réfréner ensemble et trouver des solutions.
Les images captées par les caméras embarquées pourraient donc servir, en cas de phénomène de violence, de preuve et être utilisées pour régler plus rapidement les affaires ?
Justement, il faut préciser que les images de la caméra embarquée seront utilisées uniquement à des fins disciplinaires, elles ne seront pas utilisées ou mises en avant sur les réseaux sociaux ou autre. Elles peuvent servir uniquement de preuves pour la Commission de Discipline et ensuite les images sont détruites s'il n'y a pas eu de faits de violence ou une fois que ceux-ci ont été traités. Nous sommes sur un lieu public, le District du Grand Vaucluse est l'organisateur de ces évènements, donc filmer ou enregistrer n'est pas interdit, c'est important de le préciser. Filmer est autorisé, c'est l'utilisation qui en est faite derrière qui est réglementée.
C'est une fierté pour vous, en tant qu'arbitre, de participer et d'être même à l'origine d'un projet qui est novateur pour notre football ?
Oui, en plus de cela je suis juriste donc je suis confronté à des faits de violence tous les jours dans mon travail. En tant que président de la Commission de Discipline et arbitre de ligue en activité je suis très heureux d'avoir pu aider le District à monter ce projet et d'avoir été le premier à être équipé de cette caméra. Ce qui me fait particulièrement plaisir c'est de pouvoir aider tous les acteurs du football, joueurs, entraîneurs, présidents, arbitres, supporters... Notre but c'est d'éradiquer toute forme de violence, qu'elle soit physique ou verbale, de nos terrains, donc oui, je suis très fier de participer à cette expérimentation et remercie le Comité Directeur et le Président du District, Christophe Benoît, de m'avoir fait confiance.
En renforçant la sécurité autour de nos arbitres, il est possible également de redonner l'envie à des personnes d'exercer cette fonction qui devient de plus en plus compliquée ?
Exactement, c'est vrai que malheureusement on a de moins en moins d'arbitres et c'est un constat factuel, même au niveau de la Fédération, les chiffres sont là. Nous voulons que tous les acteurs puissent se rendre sur un match de football dans de bonnes conditions et comme l'a dit le président du District, la sécurité n'a pas de prix.
Propos recueillis par Jules Gris.
Actualités Similaires
Restez informé !
Inscrivez-vous à notre newsletter :